Jamais œuvre, inspirée d'une conception dualiste du monde ne fût aussi minutieusement construite, que l'est la divine comédie de Dante. c'est entre 1307-1309 qu'elle fut écrite, et publié quelque 150 ans après la mort de poète, soit plus de 600 ans. cependant, elle pose toujours un certain nombre de problèmes à la théologie, à la foie,et à la psychanalyse.
".. au milieu du cours de la vie,
je me vis entouré d'une sombre forêt,
après avoir perdu le chemin le plus droit.
Et comme à bout de souffle on arrive parfois
à s'échapper des flots et, retrouvant la terre,
on jette un long regard sur l'onde et ses dangers,
mon âme qui défaillait encore,
se retourna pour voir le passage
qui ne laissa jamais personne en vie"
C’est sous la conduite de Virgile d'abord, mandé par Béatrice, que commence le voyage de Dante. Il va le mener par l’Enfer, seule sortie de cette forêt. Dante et Virgile vont alors descendre à travers les neuf cercles concentriques dans chacun desquels sont logés, par ordre de vice, les occupants de l’Enfer.On y retrouve un certain nombre de personnages mythologique ainsi que des personnalités et des contemporains de Dante. Il va nous décrire donc l'enfer, qui est à Jérusalem, au centre de la terre "au cœur de la glaciation suprême". ensuite par un retournement décrit la restauration de l'État idyllique et le cheminement vers les cieux.
"Rend grâce, rend grâce au soleil des anges, grâce auquel tu viens jusqu'au soleil sensible"
On peut se poser la question, en ce qui concerne la divine comédie s'il y a véritablement une différence entre la vision, et l'imagination poétique et créatrice. les théologies ont attesté, que l'imagination créatrice serait enfaite une imagination réceptrice de tout ce qui vient de la transcendance (?). Ce qui apparait au premier plan c'est que Dante fait l'expérience d'un certain nombre d'états intérieurs qu'il nomme tour à tour, l'enfer, le purgatoire ou le paradis.
C'est dans un contexte politique extrêmement violent qu'est écrite la divine comédie, guerres entre guelfes et gibelins (moyen âge italien) qui tourne autour de la séparation des pouvoirs.
"..Pourrait-on regarder les gens ensevelis
dans ces tombeaux ? J'en vois les couvercles levés,
et personne n'est là, qui puisse l'interdire. »
Il répondit alors : « Ils resteront ouverts
jusqu'au jour où viendront, retour de Josaphat,
les corps qu'ils ont jadis abandonnés là-haut.
Regarde par ici : de ce côté se trouvent
les tombeaux d'Épicure et de tous ses disciples,
qui veulent que l'esprit finisse avec le corps.."
Dante considère qu'il va écrire un poème sacrée. ce qui implique, que le lecteur doit y déchiffrer un certain nombre de symboles et de signaux, qui vont le transformer lui même.Parcours initiatique où on se métamorphose à l'intérieur même de son âme..
A l'inverse de ceux qui représentent l'enfer comme des flammes qui consument le corps, chez Dante ça se résume dans une sorte de glaciation sans fin. c'est à dire qu'au fond de nos propres tourments, il y a cette glace, cette immobilité, et cette mort en nous même.
À ces mots se dressa sous le même couvercle
un esprit découvert jusqu'au ras du menton
et qui devait rester sans doute agenouillé.
Il scruta tout d'abord les alentours, voulant
s'assurer qu'avec moi personne ne venait,
et sitôt qu'il eut vu ses doutes dissipés,
il me dit en pleurant : « Si tu pus pénétrer
dans nos noires prisons grâce à ton bel esprit,
où se trouve mon fils ? pourquoi viens-tu sans lui ? »
Le latin ne convient plus, il est encore enseigné en théologie, et dans d'autres branches, mais il s'agit de faire parler une langue nouvelle pour des choses qui vont dans l'au-delà, au fond de cet au-delà. Il y a des langues qui circulent:la principale est le provençale, dans le milieu de la france, à travers les
troubadours.Il faut donc dépasser le latin, intégrer le provençale, et inventer une langue nouvelle qui soit sacrée et qui dure:c'est l'italien!
Virgile s'arrête au sommet du purgatoire.tout bonnement, parce qu'il ne sait pas ce qu'il s'est passé après lui:"l'avènement du christianisme". Dante condense alors les 13 siècles jusqu'à lui et introduit une figuration qui n'est pas trouvable avant lui dans l'histoire de la métaphysique:
"l'amour" personnifié par Béatrice (2 ème intercesseur). L'intellect d'amour ne se trouve pas avant lui, et sa relation avec les sociétés secrètes de son temps
"les fidèles d'amour"de la vita nova entre autres, n'est pas à négliger dans cette figuration, qui a muri à travers les troubadours, comme conséquence logique de l'aménagement qu'a nécessité le christianisme "la vierge Marie", où pour la première fois on parle de la pénétration de la substance féminine comme ravissement.
"-Déjà, sur le visage de madame se refixaient mes yeux, et à leur suite mon cœur se détachait de tout le reste, elle ne riait point -Si je riais, tu deviendrais pareils à ses mêlés, quand son corps se fit cendre, car ma beauté, bien plus flamboyante, tu l'as bien vu. qu'on s'élève plus haut par les degrés du palais éternel, brille si fort, qu'en l'affrontant sans voile ta force humaine en subirait l'éclat, comme un rameau que fracasse la foudre"
"Nous voici élevé au septième astre, qui sous l'art d'empoitraille du lion, lance des rayons empreignes de sa vertu, que ton esprit s'attache à tes regards et qu'il te soient des miroirs, pour la figure qui dans ce miroir ci va t'apparaitre"Dante qui veut introduire une nouvelle vision du monde, se donne le droit de parler dans une langue nouvelle et de prétendre connaitre des choses que ne pouvait pas connaitre Virgile, qui est rappelons le, le poète le plus important de "son" temps, qui se réclamait poète officiel de
l'empire romain-germanique,dont se réclame aussi Dante, et qui était censé avoir fait son voyage aux enfers tout comme
Homère ainsi que d'autres avant lui..Mais c'est la première fois que tout est si minutieusement construit, car depuis le christianisme quelque chose a pris forme, des degrés aussi bien dans la perdition que dans le salut et la connaissance.
Le parcours nous montre que l'enfer est une perte de langage, une stéréotypie du langage, une aphasie, un bredouillement, une perte de sens, tout comme l'ont souligné
Freud et Lacan plus tard. c'est
babel enfoncé au centre de la terre, où personne ne comprend plus personne, où Nemrode parle une langue que personne ne comprend plus. Pétrification, dévoration aphasique de soi:
Satan avec ses trois têtes dévore les corps dans la glace, la bouche plaine..Les trois têtes ici sont:"la haine, l'ignorance et l'impuissance" contrairement à la trinité (après le purgatoire) "l'amour, la connaissance et la puissance (qui n'est pas le pouvoir)".
Ce qu'il nous dit c'est, vous êtes votre essence d'homme, de mortels, c'est le langage. voilà ce que vous en faites ou vous n'en faites pas, et c'est d'après votre position par rapport au langage que vous irez soit au paradis, soit au purgatoire, soit en enfer. Et il rajoute, que ce qu'il nous dit a au moins 4 sens:
Le paradis selon Dante, c'est avoir une parole assez forte pour allier constamment ces 4 sens à la fois, et lorsqu'on perd un de ses sens on a tendance à se rabattre sur le sens "littéral" , ce qu'on peut voir se produire aujourd'hui dans la communication, incessante, intempestive. Et qu'est ce qu'un humain qui perd le sens de sa parole, de sa puissance, de son efficacité? un humain qui s'infernalise lui même!
Les mots les plus utilisé par Dante au paradis, sont:rire, plaisir, et jouissance. mais jouissance n'est pas purement physique et corporelle, c'est l'intellect d'amour:plus vous jouissez, plus vous comprenez, et plus vous comprenez, plus vous jouissez, ça va vers le sans fin..
Le troisième et dernier intercesseur, après Béatrice dans l'entrée dans la divinité, est
St Bernard de clairvaux, le français, porte parole de
l'ordre du temple (trait d'union entre
l'islam mystique et la chrétienneté à travers lequel les
fidèles d'amour d'Iran étaient venu en occident) , avec lequel Dante sort du paradis pour s'effacer dans les cieux.